Blogger Widgets

12 dirigeants européens et une lettre ouverte

Douze chefs de gouvernement de l'Union européenne, dont le Britannique David Cameron, l'Italien Mario Monti et l'Espagnol Mariano Rajoy, présentent, dans une lettre ouverte, leurs priorités pour relancer la croissance européenne, appelant notamment à ouvrir davantage à la concurrence les marchés des services et de l'énergie.

Cette initiative, plutôt rare venant d'états, a été adressée au président de l'UE Herman van Rompuy et au président de la Commission européenne José Manuel Barroso ce lundi.


Avant de parler de ce texte, je voudrais poussez un petit coup de gueule contre la presse  qui rapporte cet événement mais qui ne propose même pas un lien internet vers le texte intégral signé. Quel mépris pour le lecteur! j'ai donc fouiné sur le site internet du Premier ministre de sa Gracieuse majesté pour trouver le texte en anglais (placé en fin d'article). Ceux qui maitrisent l'anglais pourront donc se forger une opinion factuelle sans passer par l'intermédiaire d'une presse qui agit quelque fois plus comme un formateur d'esprit que comme un organe d'information.

Qui, à qui et pourquoi?

En vert les signataires (vert clair ceux de l'Euroland)
Douze chefs de gouvernement de l'Union européenne on signé cette lettre mais en réalité on sait bien que ce n'est pas l'Estonie ni la Lettonie qui sont les instigateurs de cette rébellion mais bien la perfide Albion. Paradoxalement ceux qui réclament plus d'Europe avec parfois des accents keynésiens sont des eurosceptiques de plus ou moins longue date et surtout des hommes politiques de droite libérale qui pratiquent les politiques économiques les plus restrictives des pays de l'Union.

 Si la lettre est adressée officiellement à Barosso et van Rampuy. En réalité on l'aura bien compris, cette missive s'adresse au couple Merkozy (je déteste cette expression mais c'est un incontournable maintenant) accusé, à tort ou à raison, de ne pas jouer collectif et de prendre des décisions sans consulter au préalable leurs partenaires européens. Le président de l'UE et le président de la Commission européenne auraient même pu la signer. Sans aucun doute ils en approuvent l'esprit, eux qui se sont plaint de n'avoir été associés aux grandes décisions avec du retard.
Quand on a des rancœurs et des griefs, comme Cameron et la Suède qui veulent le beurre et l'argent du beurre, c'est-à-dire ne pas adopter la monnaie unique mais vouloir avoir droit au chapitre concernant tout ce qui concerne l'Euro, ou comme l'Espagne  et l'Italie, deux grands pays à l’échelle de l'Europe mais des nains dès qu'on traverse l'Atlantique, on a tendance à les coucher sur du papier.

Quelle valeur accorder aux cris du cœur de quelques dirigeants européens en mal de reconnaissance? Peut-être la seule volonté de montrer à leur opinion publique qu'eux aussi comptent et que le couple franco-allemand n'a pas le monopole des initiatives. Si l'on regarde de plus près le texte publié on se rend vite compte qu'il s'agit surtout d'un Gloubi-Boulga  indigeste qui part dans tous les sens mais avec un fil conducteur évident, continuer l’œuvre d'unification du marché européen dans un sens libérale. Il faut saluer le travail de rédacteurs de cette pétition de luxe, concilier les désires et les intérêts de prospères, dynamiques et pingres pays comme les Pays-Bas et le Finlande avec des puits sans fonds à subventions communautaires tel que l'Espagne ou l’Irlande relevait de la gageure. C'est pour cette raison d'ailleurs qu’il ne sera donc pas question ni d'emprunt européen ni du budget commun ni de renforcement du Mécanisme européen de stabilité qui sont pourtant des sujets d'urgence. Conséquence de cet "oubli", cette lettre va paraitre bien éloignée des préoccupations du moment.


Les huit priorités selon les douze

Contrairement au titre maladroit du Nouvel Obs, Douze dirigeants européens, dont Cameron, Monti et Rajoy, plaident pour la relance de la croissance., il s'agit plus de relancer le processus de dérégulation que de relance économique.

  1. Il nous faut continuer à progresser dans la réalisation et l'achèvement du marché unique en en renforçant la gouvernance ainsi que l’application effective de ses dispositions.
Rien d'original venant de dirigeant modéré de droite comme de gauche. Un réponse aux "bruits de botte"  protectionnistes qu'on entend de plus en plus ("produisons en France", "produire français" etc.) , enfin surtout à l’approche d'une élection majeure. 

      2.  Création d’un véritable marché numérique européen dès 2015.

Une proposition qui ne mange pas de pain et qui donne une petite peinture moderne et futuriste à le lettre.

     3.  Marché unique de l’énergie.

Une crotte de nez vers Merkel qui a décidé d’arrêter le nucléaire chez elle sans concertation avec ses partenaires européens et une autre pour Sarkozy qui n'a pas envie d'avoir les électriciens d'EDF sur le dos.

     4.  Favoriser la recherche et l’innovation.


Même chose que le point 4. c'est dans l'air du temps et cela ne mange pas de pain.

     5.  Signature des accords de libre-échange avec l’Inde, le Canada, les pays limitrophes de l’Est européen.

Le paragraphe écrit, á coup sûre, par le Foreign office, Inde et canada, deux anciennes colonies britanniques avec lesquelles Londres conserve des relations privilégiées. Aucune référence au problème de non-réciprocité ou de non-application de conventions internationales pour la protection de l'environnement qui pénalisent les industries européennes. Quant à l'aspect social...laisse tomber Gérard!

     6.  Renforcer programme de réduction du poids des réglementations européennes. 

Une redite du point 1 surement à l'attention des malentendants.

    7.  Renforcer la mobilité du travail afin de réaliser l'objectif d'un marché européen du travail plus intégré et plus ouvert par exemple en faisant avancer le projet de doter les travailleurs migrants de droits à la retraite supplémentaires.

En claire il s'agit d'aligner le droit du travail sur le moins disant. L’entreprise qui aura le choix de procéder à une embauche selon le droit social britannique peu contraignant et le droit  français très (trop?) protecteur ne va pas hésiter longtemps.
Qui va financer le droit à une retraite supplémentaire? Le pays de départ ou le pays d’accueil? On a tous en mémoire le cas de traders français installés à Londres qui, lorsqu'ils perdaient leur emploi, revenaient en France pour bénéficier des indemnités offertes, c'est le cas de le dire, par les Assedic, alors qu'ils n'avaient pas cotisé à la caisse d'assurance chômage française.  Si ils étaient resté à Londres ils auraient touché des nèfles.

     8.  Réduire l’engagement implicite de soutien en toutes circonstances aux banques en difficulté qui fausse le fonctionnement du marché unique.

The best.  Comment les Premiers ministres irlandais et espagnoles peuvent-ils encore se regarder dans la glace après avoir lu ces quelques mots?  L'effort de la Banque centrale européenne vis-à-vis des banques espagnoles pour les sauver de la faillite se monte à 133 milliards, soit l’engagement le plus important pour un seule pays. Le plan de sauvetage de l'Irlande, financé par les autres pays européens, n'a eu qu'un seul objectif, sauver son système bancaire de l'île.

Le numéro que vous avez demander n'est plus attribué

Les lignes de téléphones entre capitales seraient-elles coupées pour que les dirigeants européens en soient réduit à utiliser la technique de la Lettre ouverte qui généralement est le fait d’organisations non-gouvernementales qui n'ont pas accès aux puissants de ce monde et qui veulent prendre le peuple à témoin.
Cela en dit long sur la dégradation de la qualité du dialogue dans l'Union à un moment où le vieux continent traverse "la pire crise que l'on ait connu depuis 1929". La perspective de l'élection de François Hollande (que j'avais pronostiqué dès juin 2011, Pourquoi François Hollande va gagner en 2012) qui affaiblira surement le tandem Paris-Berlin ne mettra du baume au cœur aux europhiles.


“We meet in Brussels at a perilous moment for economies across Europe. Growth has stalled.  Unemployment is rising. Citizens and businesses are facing their toughest conditions for years. As many of our major competitor economies grow steadily out of the gloom of the recent global crisis, financial market turbulence and the burden of debt renders the path to recovery in Europe much harder to climb. 

“Europe has many fundamental economic assets.  But the crisis we are facing is also a crisis of growth. The efforts that each of us are taking to put our national finances on a sustainable footing are essential.  Without them, we will not lay the foundations for strong and lasting economic recovery. But action is also needed to modernise our economies, build greater competitiveness and correct macroeconomic imbalances.  We need to restore confidence, among citizens, businesses and financial markets, in Europe’s ability to grow strongly and sustainably in the future and to maintain its share of global prosperity. 

“We discussed these issues when we last met. It is right that we discuss them again. Building on the conclusions we have previously reached, it is now time to show leadership and take bold decisions which will deliver the results that our people are demanding. We welcome the steps being taken, nationally and at the European level, to address this challenge and look forward to agreeing further concrete steps at our next meeting, with action focused on eight clear priorities to strengthen growth. 

“First, we must bring the single market to its next stage of development, by reinforcing governance and raising standards of implementation. The Commission’s report to the June European Council should set out clear and detailed actions needed to enhance implementation and strengthen enforcement. 

“Action should start in the services sector. Services now account for almost four fifths of our economy and yet there is much that needs to be done to open up services markets on the scale that is needed.  We must act with urgency, nationally and at the European level, to remove the restrictions that hinder access and competition and to raise standards of implementation and enforcement to achieve mutual recognition across the single market. We look forward to the Commission report on the outcome of sectoral performance checks and call on the Commission to fulfil its obligation under the services directive to report comprehensively on efforts to open up services markets and to make recommendations for additional measures, if necessary in legislation, to fulfil the internal market in services. 

“Second, we must step up our efforts to create a truly digital single market by 2015. The digital economy is expanding rapidly but cross-border trade remains low and creativity is stifled by a complex web of differing national copyright regimes. Action is needed at the EU level to provide businesses and consumers with the means and the confidence to trade on-line, by simplifying licensing, building an efficient framework for copyright, providing a secure and affordable system for cross-border on-line payments, establishing on-line dispute resolution mechanisms for cross-border on-line transactions and amending the EU framework for digital signatures. We should build on the recent proposals of the Commission, without reopening the e-commerce directive, to create a system that balances the interests of consumers, businesses and rights holders, and spurs innovation, creative activity and growth. We must also continue our efforts to build modern infrastructure to provide better broadband coverage and take-up and extend and promote e-government services to simplify the start up and running of businesses and aid the mobility of workers. 

“Third, we must deliver on our commitment to establish a genuine, efficient and effective internal market in energy by 2014. All member States should implement fully the Third Energy Package, swiftly and in recognition of agreed deadlines. Energy interconnection should be enhanced to help underpin security of supply.  Urgent action is also needed, nationally and where appropriate collectively, to remove planning and regulatory barriers to investment in infrastructure to release the potential of the single market and support green growth and a low-emissions economy. We look forward to the Commission’s forthcoming communication on the functioning of the internal market, which should include an assessment of the degree of liberalisation and energy market opening in member States. We also commit to making concrete progress towards the development of a Single European Transport Area and establishing the Connecting Europe Facility.

“Fourth, we must redouble our commitment to innovation by establishing the European Research Area, creating the best possible environment for entrepreneurs and innovators to commercialise their ideas and create jobs, and putting demand-led innovation at the heart of Europe’s research and development strategy. We must also act decisively to improve investment opportunities for innovative start-ups, fast-growing companies and small businesses, by creating an effective EU-wide venture capital regime which allows venture capital funds to operate on a pan-European basis, assessing a proposal for an EU venture capital scheme building on the EIF and other financial institutions in cooperation with national operators, and agreeing a new EU-wide programme, modelled on the Small Business Innovation Research scheme, to promote more effective use of pre-commercial public procurement to support innovative and high tech businesses. Reforms to create an effective and business-friendly system of intellectual property protection remain a very high priority.

“Fifth, we need decisive action to deliver open global markets. This year we should conclude free trade agreements with India, Canada, countries of the Eastern neighbourhood and a number of ASEAN partners.  We should also reinforce trade relations with countries in the southern neighbourhood. Fresh impetus should be given to trade negotiations with strategic partners such as Mercosur and Japan, with negotiations with Japan launched before the summer, provided there is progress on the scope and ambition of a free trade agreement. The deals that are currently on the table could add €90 billion to EU GDP.  

“But we must go further too. We need to inject political momentum into deepening economic integration with the US, examining all options including that of a free trade agreement; seek to deepen trade and investment relations with Russia, following its accession to the WTO; and launch a strategic consideration of our trade and investment relationship with China, with a view to strengthening our economic ties and reinforcing commitment to rules-based trade. Recognising the benefits that open markets bring, we should continue our efforts to strengthen the multilateral system, including through the Doha Development Agenda, strive for multilateral and plurilateral agreements in priority areas and sectors, and resist protectionism and seek greater market access for our businesses in third countries.  Above all, we must reject the temptation to seek self-defeating protectionism in our trade relations.

“Sixth, we need to sustain and make more ambitious our programme to reduce the burden of EU regulation.  We welcome the commitments made by the institutions to reduce burdens on small businesses but urge further and faster progress across the EU institutions while maintaining the integrity of the single market and the Union’s wider objectives. We should assess the scope for ambitious new EU sectoral targets and agree new steps to bring tangible benefits to industry. We should also make a very clear and visible statement of our intention to support micro-enterprises and ask the Commission to present detailed proposals to achieve this, including possible amendments to existing legislation. We also ask the Commission to publish an annual statement identifying and explaining the total net cost to business of regulatory proposals issued in the preceding year. 

“Seventh, we must act nationally and, respecting national competences, collectively to promote well functioning labour markets which deliver employment opportunities and, crucially, promote higher levels of labour market participation among young people, women and older workers. Special attention should also be given to vulnerable groups that have been absent from the labour market for long periods.  We should foster labour mobility to create a more integrated and open European labour market, for example by advancing the acquisition and preservation of supplementary pension rights for migrating workers, while respecting the role of the social partners. We should also take further action to reduce the number of regulated professions in Europe, through the introduction of a tough new proportionality test set out in legislation. In this context, we ask the Commission to convene without delay a new forum for the mutual evaluation of national practices to help identify and bring down unjustified regulatory barriers, examine alternatives to regulation which ensure high professional standards and assess the scope for further alignment of standards to facilitate mutual recognition of professional qualifications.  

“Finally, we must take steps to build a robust, dynamic and competitive financial services sector that creates jobs and provides vital support to citizens and businesses. Implicit guarantees to always rescue banks, which distort the single market, should be reduced.  Banks, not taxpayers, should be responsible for bearing the costs of the risks they take. While pursuing a level playing field globally, we should commit irrevocably to international binding standards for capital, liquidity and leverage with no dilution, ensuring that EU legislation adheres to Basel 3 standards to ensure financial stability and meet the financing needs of our economies.   Banks should be required to hold appropriate levels and forms of capital in line with international criteria, without discrimination between private and public equities. We also call for rigorous implementation of the G20 principles on banking sector remuneration in line with existing EU legislation.

“Each of us recognises that the plan we propose requires leadership and tough political decisions.  But the stakes are high and action in many of these areas is long overdue. With bold and effective action and strong political will we can recover Europe’s dynamism and put our economies back on the path to economic recovery. We urge you and the European Council to answer our peoples’ call for reform and to help restore their confidence in Europe’s ability to deliver strong and sustainable growth.

“We are copying this letter to colleagues on the European Council.”

2 commentaires:

  1. Les relations entre les États membres se fissurent de plus en plus, alors même que l'Europe aurait besoin d'une atmosphère de confiance pour construire un véritable pouvoir politique, nécessaire à une re-règlementation des marchés et, somme-toutes, aux prémices d'une puissance cohérente. Résultat ? La politique se fait à la corbeille, faute d'instances puissantes (pauvre Général) ...
    Nous sommes sur le point de faire un pas en arrière, alors que c'est de l'avant qu'il nous faudrait aller ...

    RépondreSupprimer
  2. Moi je crois plutôt qu'on a vécu une longue période de déni où les dirigeants européens ont cru que les Etats-nations avaient disparus.

    Les Grecs sont les Grecs et les Allemands les Allemands. les Allemands de l'Ouest veulent bien payer pour les Allemands de l'Est mais pas pour les Européens du sud qui restent à leurs yeux des étrangers. Ce constat est aussi valable pour les Français. Personne ne remet en cause l'aide à la Corrèze mais quand il s'agit de prêter à la Grèce c'est plus la même chose.

    RépondreSupprimer

Votre commentaire sera publié après modération.

blogger